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Extradition de François Compaoré

Mise au point de l’écrivain Loro MAZONO suite aux élucubrations de l’ancien ministre des Sports René Emile KABORE en exil en Côte d’Ivoire.

Maître François-Henri Briard, un des avocats de François Compaoré,  accorde une interview à  un journaliste français  sur la question  de l’extradition  de son client vers le Burkina Faso. Suite à cet entretien, monsieur René Emile  Kaboré dit  entre autres, «  je me suis senti, comme  beaucoup de nos compatriotes, interpellé. », «  le devoir que  nous avons de dire ce que nous savons, de porter un  témoignage  de la vérité ». Nous avons pris connaissance de ce dicours avec beaucoup d’intérêt sur le Forum du Mouvement burkinabè des Droits de l’Homme et des Peuples, (MBDHP), section de France. Dans son intervention, il fait le procès de la gouvernance du Chef de l’Etat burkinabè. Eh bien, si son discours s’était essentiellement focalisé sur ce sujet, nous  n’aurions pas réagi. Car   c’est  son droit  le plus absolu de pourfendre.  Mais, là où le bât blesse, en abordant la question de l’assassinat du journaliste Norbert Zongo, il étale des élucubrations  choquantes. Face à  celles-ci, nous ne pouvons pas nous taire, et il est de notre devoir de porter une contradiction. Car  l’ambition affichée de l’ancien ministre  est ostensible :   travestir la réalité de l’assassinat du journaliste.  Mais avant de rentrer dans le vif du sujet, nous l’invitons   à méditer cette réflexion de Victor Hugo : « Il me convient d’être avec les peuples qui meurent, je vous plains d’être avec le roi qui tue. » Monsieur l’ex-ministre des Sports, vous avez choisi votre camp, vous avez gouverné avec l’ex-président Blaise Compaoré, vous êtes avec le « roi » qui tue.  En revanche, nous, nous sommes avec les « peuples » qui « meurent ». Donc, vous et nous, nous ne sommes pas du même monde. Dans votre crasse « témoignage », vous ne voulez pas   reconnaître que c’est François Compaoré qui a commandité l’assassinat du journaliste Norbert Zongo. Cette réalité-là, les murs et les arbres du Burkina Faso ne l’ignorent pas, a fortiori les Burkinabè.   Dans votre divertissement, vous voulez nous faire prendre des vessies pour des lanternes.  Vous signalez que le 13 décembre 1998 (date de l’assassinat Norbert Zongo), à une semaine de l’investiture de monsieur Compaoré pour son énième mandat, c’est inimaginable que son pouvoir ait pris la décision d’éliminer le journaliste. Vous oubliez que François Compaoré et les zélés du Régiment de la sécurité présidentielle réfléchissaient depuis longtemps dans la pure discrétion sur ce qu’il convenait d’appeler le « cas du petit journaliste ». Pourquoi ? Les Burkinabè savaient que Norbert Zongo faisait son travail avec beaucoup de professionnalisme et de rigueur. Il avait le sens aigu de la responsabilité. Il faisait tout son possible pour ne pas s’exposer à la corruption qui est la plaie de nombre de journalistes. Il n’entendait pas vendre son âme aux « diables » du CDP (Congrès pour la Démocratie et le Progrès), le parti de l’ex-président Compaoré.  Ses investigations touchaient la gouvernance du pouvoir en place. Parfois, quand Norbert Zongo notait des injustices, il consacrait des articles sur les entreprises de la belle-mère de François Compoaré, Alizéta Ouédraogo, une dame influente qui faisait partie de la galaxie du président.  En un mot, il critiquait, la culture de l’impunité, les abus du pouvoir, révélait des affaires sombres qui éclaboussaient sa gouvernance. La seule obsession du journaliste : assainir les mœurs politiques de son pays à l’aide de sa plume.  François Compaoré et son frère président craignaient que le journaliste ne mette à bas leur pouvoir.

Norbert Zongo, qui faisait consciencieusement son travail, a attiré la détestation haineuse de certains membres du CDP de l’époque, et surtout de François Compaoré. Cette réalité-là, monsieur l’ex-ministre René Emile Kaboré ne peut l’ignorer. Vous jouez les autruches, nous vous rappelons certains faits. Certes, à quelques joursde l’assassinat du journaliste, ce dernier a été l’objet d’une véritable filature. Les filateurs, entre autres l’adjudant Marcel Kafando, le sergent Edmond Koama, Ousséni Yaro, Christophe Combacéré, Wampasba Nacoulma, (certains d’entre eux ne sont plus de ce monde) faisaient partie de la garde rapprochée du président Compaoré. Ils connaissaient le programme du journaliste jusque dans les moindres détails. Ce sont eux qui ont planifié et exécuté l’odieux crime de Sapouy, le dimanche 13 décembre 1998 dont le cerveau était Marcel Kafando. Le journaliste Guy Sana écrira dans le numéro spécial de l’Indépendant du 13 décembre 2004 : « A l’approche de l’assassinat du journaliste, on indique que les espions qui devaient déterminer avec exactitude le programme de Norbert Zongo étaient devenus nombreux au « Conseil » si bien qu’on ne savait plus qui fait quoi exactement dans cette affaire. Ils ont pu obtenir des informations selon lesquelles le journaliste devait se rendre dans son ranch le dimanche 13 décembre. Décision fut donc prise pour le neutraliser et le réduire en cendres à cet endroit. » Certes, ce fragment de texte, n’a pas valeur de décision de justice. En revanche, celui-ci pourrait faire voler en éclats, les accroires de l’ex-ministre des Sports, serviteur de l’ex-président Compaoré. D’ailleurs, un autre fait nous paraît révélateur, la veille ou le jour même de l’assassinat du journaliste, François Compaoré a organisé exprès un voyage sur l’Hexagone. Monsieur René Emile Kaboré peut-il nous dire pourquoi un tel voyage ?  Cette mise en scène grossière visait certainement à dire: « Voyez- vous !  Je ne suis ni de loin ni de près mêlé à l’affaire de l’assassinat de Norbert Zongo. »   Les mots du journaliste Michel Zoungrana dans l’Indépendant du 13 décembre 2004 sont éloquents : « La hiérarchie militaire du RSP informe le président Blaise Compaoré (rentré de voyage)  qui fait convoquer Marcel Kafando pour confirmation, mais celui-ci  décide de ne rien dire sans la présence de François Compaoré en séjour en France. Il nie devant le président être l’auteur de l’assassinat. Mais Blaise Compaoré ne croit pas trop ; il a reçu des informations claires là-dessus. »  Dans une interview, Halidou Ouédraogo ne cachait pas ses sentiments : « C’est le pouvoir de la IVème République qui a tué Norbert Zongo ».  Voilà une vérité que l’ex- ministre René Emile Kaboré n’aimerait pas entendre, parce qu’il est prisonnier de ses propres préjugés. L’une des armes utilisées, pour abattre le journaliste, est le fameux fusil à pompe et à calibre 12. Monsieur Kaboré, à qui profitait le crime ?  Indéniablement au pouvoir du président, parce qu’ayant réduit le journaliste au silence, les Compaoré et consorts pensaient dormir paisiblement. Certes, nous regrettons profondément l’assassinat de Norbert Zongo. Mais nous reconnaissons que son travail a porté ses fruits : éveiller les consciences. Le peuple burkinabè a ainsi découvert la formule   de Jean-Jacques Rousseau : « Quand un peuple ne défend pas ses libertés et ses droits, il devient mûr pour l’esclavage. » Et certainement c’est en les défendant que celui-ci a mis fin à 27 ans de règne du dictateur ! Certainement monsieur Kaboré a été surpris par la fameuse date du 31 octobre 2014 !  Vous êtes dans le déni monsieur l’ancien ministre, au point de penser que votre pouvoir n’est pas responsable de l’assassinat du journaliste. Vous dites vouloir « porter un témoignage de la vérité » et vous demandez qu’on fasse appel « au bon sens » pour chercher les causes de l’assassinat de Norbert Zongo ailleurs ! On comprend que vous voulez dédouaner votre « client » de toute accusation !  Pour notre part, votre « témoignage » n’est ni plus ni moins qu’un tissu de mensonges ou des balivernes. Sachez qu’au   lendemain de l’assassinat du journaliste, François Compaoré  a fait preuve de largesse en donnant un  véhicule flambant neuf à   l’adjudant Marcel Kafando, et  des cyclomoteurs, de marque Yamaha, à  Banagolo Yaro et à  l’adjudant  Badiel ; les autres tueurs ont préféré des espèces sonnantes et trébuchantes par souci de discrétion. Au regard de ces faits, certains Ouagalais disaient avec beaucoup d’ironie : « Les Yamahas de Norbert Zongo » ! On racontait même que pour fêter l’odieux crime de Sapouy des bœufs ont été immolés au sein du « Conseil » (siège du Régiment de sécurité présidentielle)  en présence,  d’un gourou pour ne pas dire « un wakman béninois ». Si François Compaoré s’est livré à un tel cynisme ça prouve qu’il se réjouissait de l’assassinat du journaliste à qui il vouait une haine incroyable, donc il est bel et bien le commanditaire du crime de Sapouy.  Alors, que l’ancien ministre des Sports René Emile Kaboré cesse d’insulter l’intelligence des Burkinabè épris de justice.

Loro Mazono

Ecrivain.

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